Numérisation de la vie économique : 4 règles nouvelles

  • Numérisation
  • Pierre Gonzva

Les pouvoirs publics entendent, avec raison, promouvoir la numérisation de la vie économique, tant dans les transactions pour les entreprises que dans les relations avec les administrations. Leur usage généralisé va simplifier la vie des entreprises; il vise également à faciliter la détection des comportements répréhensibles et des fautes. Enfin, il oblige les entreprises à se mettre à niveau, pour pouvoir répondre aux appels d’offre publics, dialoguer avec l’Administration et répondre à ses questions.

1. DSN et FEC

La DSN, déclaration sociale nominative, est une mesure importante de simplification. En une seule déclaration informatisée, faite par un logiciel de paye, via l’expert-comptable ou le site www.net-entreprises.fr, l’entreprise effectue la totalité des déclarations sociales relatives à son personnel. Elle remplace 6 déclarations différentes. Sa mise en place est progressive selon la taille des entreprises; elle sera généralisée à compter de début 2017.

Le FEC, fichier des écritures comptables, est destiné à faciliter le contrôle des comptabilités par le fisc. L’administration fiscale oblige à enregistrer la comptabilité dans un fichier unique, au format défini par elle. Il est obligatoire depuis 2014. En pratique, tous les logiciels comptables du marché se sont mis à niveau. Son caractère obligatoire signifie qu’il n’est plus possible de tenir une comptabilité de façon manuelle, ou sur un tableur, sous peine de ne pas être en règle et d’être passible d’une amende. Avec les contrôles automatiques sur fichiers FEC, l’administration fiscale a renforcé ses outils de lutte contre la fraude fiscale.

2. Logiciels de caisse certifiés

Afin de lutter contre la fraude à la TVA, la loi de finances pour 2016 instaure l’obligation d’utiliser des logiciels de caisse sécurisés et certifiés, à partir du 1er janvier 2018. L’objectif est d’empêcher l’effacement de tickets de caisse. Cette disposition vise particulièrement les commerces. Le système de gestion de caisse devra garantir l’inaltérabilité, la sécurisation, la conservation et l’archivage des données. L’attestation sera délivrée par un certificateur externe, ou par l’éditeur du logiciel, qui se sera fait certifier. Une amende de 7500 € est prévue en cas d’absence de cette attestation. Il importera donc en 2017 de se mettre à jour sur ce point, en vérifiant la compatibilité de son système ou de son logiciel, et au besoin en investissant dans un nouveau matériel ou en souscrivant le contrat logiciel adapté. L’Administration aura certainement la main lourde sur les amendes, sachant que le défaut d’attestation risquera d’entrainer en plus un contrôle fiscal.

3. Facture électronique obligatoire pour les Marchés Publics

A partir de 2017, la facture électronique est obligatoire pour les grandes entreprises. Cette obligation sera ensuite étendue, et généralisé à toutes les entreprises en 2020, pour transmettre leurs factures à l’Etat, aux collectivités locales et aux établissements publics.

Pour se faire, le système Chorus Pro est mis en œuvre à partir de 2017 : utilisable gratuitement par les fournisseurs, il permet le dépôt, la réception, la transmission et le suivi des factures électroniques, en format pdf, en saisie directe sur le portail, ou en EDI, échanges de données informatisées.

A noter que les grandes entreprises obligent de plus en plus leurs fournisseurs à travailler selon un modèle équivalent, pas toujours gratuit cependant : frais d’inscription et abonnements annuels sont courants.

4. Transparence et lutte contre la corruption

La Loi Sapin II, actuellement en discussion, vise à renforcer la transparence et la lutte contre la corruption. Si son principe est louable, elle va mettre à la charge des entreprises de très lourdes obligations en matière déclaratives, avec un renversement de la charge de la preuve, qui fait que l’entreprise sera considérée comme fautive si elle ne peut pas prouver qu’elle a respecté toutes ses obligations. Si une entreprise invite à déjeuner un élu local ou un agent de l’administration, elle devra établir une déclaration. On souhaite bien du plaisir à l’Agence chargée de collationner et d’étudier toutes ces déclarations. Dans ce cas précis, l’objectif de transparence prend le pas sur celui de simplification.

Comme on le voit, les outils numériques automatisent les tâches et facilitent les relations avec l’Administration. Le revers de la médaille, c’est qu’ils rendent la surveillance et les contrôles plus faciles et plus étendus, et que l’Administration risque de multiplier les obligations de transmission d’informations, au nom du principe de transparence.