Ecrit par alexandre Gonzva
Publié dans Questions juridiques
15 décembre 2015
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Afin de désengorger les Tribunaux, et de favoriser les modes amiables de résolution des litiges, les Pouvoirs Publics veulent favoriser le recours à la médiation, pour les litiges relevant de la consommation.
Pour ce faire, il est prévu une obligation pour le professionnel de garantir au consommateur un recours effectif à un dispositif gratuit de médiation de la consommation, portant l'acronyme de RELC : règlement extrajudiciaire des litiges de consommation. Cette réglementation transpose une directive de l'Union Européenne de 2013.
L'ordonnance du 20-08-2015 prévoit que le professionnel devra communiquer au consommateur les coordonnées du ou des médiateurs compétents dont il relève. Quatre objectifs sont mis en avant :
La couverture de tous les secteurs professionnels
La garantie de procédures répondant à des critères de qualité, accessibilité, impartialité, transparence, équité, efficacité
Une évaluation par une commission de contrôle de la médiation
Une information des consommateurs pour qu'ils aient un accès effectif à la médiation.
Le décret du 30-10-2015 prévoit que le professionnel communique les coordonnées du médiateur dont il relève, de manière visible et lisible, sur son site internet, ses CGV, ses bons de commande ou tout support adapté. Ces dispositions devront être mises en place à compter du 01-01-2016.
Tout manquement sera passible d'une amende administrative de 3000 € au maximum pour une personne physique, de 15000 € maximum pour une personne morale.
Le décret prévoit également la création d'une commission d'évaluation et de contrôle de la médiation de la consommation, à qui tous les médiateurs agréés doivent transmettre les informations relatives à leur activité, nécessaires à l'évaluation. Cette commission tient la liste des médiateurs agréés.
Le recours à la médiation est gratuit pour le consommateur. Les parties peuvent se faire assister par un avocat ou un expert, à leur charge.
Lorsque le consommateur saisit le médiateur, celui-ci notifie sa saisine aux parties, communique les pièces, et au besoin, reçoit les parties, ensemble ou séparément. A défaut d'accord amiable, il propose une solution, dans un délai de 90 jours à compter de sa saisine, sauf affaire très complexe.
Chaque partie reste libre d'accepter ou de refuser la solution proposée, dans le délai fixé par le médiateur; la participation à une médiation n'exclut pas le recours devant une juridiction, laquelle peut rendre une décision différente de la solution proposée par le médiateur.
Il existe déjà des médiateurs dans le secteur banques – assurances, pour l'énergie et les télécoms. Des secteurs tels que le bâtiment prévoient d'avoir un médiateur spécialisé. Les huissiers envisagent également de créer une activité de médiation. En attendant qu'un service de médiation soit référencé dans son secteur d'activité, il convient, pour tout professionnel, d'indiquer sur ses clauses contractuelles et documents commerciaux les coordonnées de la Commission de la Médiation, afin de respecter a minima les obligations légales d'information du consommateur.
Entre la recherche directe d'une résolution du litige entre l'entreprise et son client d'une part, et la procédure judiciaire, d'autre part, il y a certainement la place pour une médiation, bien organisée.
Attention cependant aux risques d'excès. En effet, la médiation est gratuite pour le consommateur, son coût sera donc supporté par le professionnel. Quel sera le coût de cette médiation ? Impossible à dire pour le moment; il dépendra des éléments du litige, de la somme due, du temps passé par le médiateur. Celui-ci ne travaillera pas gratuitement !
Des consommateurs procéduriers pourraient être tentés de faire des recours rapides voire abusifs, au médiateur, entrainant des coûts démesurés pour les professionnels, surtout si les sommes sont faibles. En effet, il n'y a pas de garde-fou au recours à la médiation. Le dispositif serait alors utilisé pour obtenir sans frais des réductions de prix, ou bien pour nuire au professionnel dont le consommateur aurait été mécontent. Par ailleurs, la médiation pourrait être un moyen de retarder le paiement, dans l'attente de la solution proposée par le médiateur. Là encore, c'est le professionnel qui serait lésé, puisque la médiation en cours suspendrait de fait, pendant sa durée, le recours à un cabinet de recouvrement de créance ou à une instance judiciaire. Les dérives d'une utilisation abusive de la médiation ne sont donc pas à exclure.
Le sujet de la médiation reviendra à l'ordre du jour en 2016, lorsque des informations sur l'utilisation réelle de cet outil seront publiées.